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Chéticamp, N.S.
Moi, j'suis Anne-Rose Deveau, pis j'suis d'une famille de huit, pis je m'ai mariée pis j'ai eu sept enfants pis 19 p'tits-enfants pis 8 arrière-p'tits-enfants, pis j'ai toujours resté chez nous avec les enfants. Quand les enfants avont été grands j'ai été travailler au Trois Pignons, pis là je hookais. J'ai toujours hooké avec ma mère pis toute allait bien. Pis là j'ai, je voulais faire une grosse album pour montrer toutes les grands tapis qui avaient été faits. Moi, j'savais pas qu'y avait des grands tapis qui avaient été faits comme ça. J'avais jamais réalisé comment que nos grands-mères pis nos arrière-grands-mères avaient travaillé… Pis toute ceux qui sont de mon âge, j'pense, c'est ceux qui, pis j'voulais faire une histoire pour que le monde su comment qu'y avaient travaillé dur. En commençant, y faisaient des tapis de laine, des tapis en brillant, pis là y mettaient ça sur le plancher pour pas… moins de… y faisait pas si frette, hein, c'était plus chaud. Pis après ça, bien y avait des colporteurs qui venaient. Pis y échangeaient des tapis pour de la vaisselle, des couvertes, du linge, toutes sortes de choses. Pis après, bien l'histoire des tapis de Chéticamp, c'est vraiment reconnu partout à cause de leur savoir-faire. Pis y avait une madame, une mademoiselle Burke, qui était une grande amie à madame Bell. Pis a l'a venu, c'était son amie. A l'est venue à Baddeck, pis a l'a essayé a faire un industrie de là, mais a l'a pas réussi. Pis de fur à mesure, bien a l'a venu à Chéticamp. Pis dans ce temps-là, on savait pas comment lancer des couleurs hein, on faisait des fleurs, on la cernait noir, pis après ça, on remplissait toute la même couleur, rouge ou bleu ou… Pis mademoiselle Burke, c'était une artiste, pis a voulait des tapis pour aller vendre, a venait de New York pis a voulait acheter des tapis pour les vendre à New York. Ça c'était en 1927. A l'a venu à Chéticamp, dans ce temps-là, y avait rien à Chéticamp. C'était aink des colporteurs. Ils avaient jamais eu de l'argent pour les tapis ni rien, pis elle a payait j'pense en commençant c'était 25 piasses, 25 cennes le pied carré. C'était pour rien, mais en même temps, c'était de l'argent hein, pis a pouvait, au fur et à mesure bien a l'a haussé ses prix, pis là, a l'a commencé par des p'tits tapis, pis après ça, bien, a l'a agrandi : a faisait ses toiles plus grandes. A allait à Baddeck, à allait à New York pis a l'avait une agente ici pis a l'envoyait ses commandes, pis après ça zeux, y les estampaient pis y donnaient ça aux femmes, pis après ça, pis a l'a montré aux femmes comment teindre de la laine pis comment nuancer les couleurs pour que ça ressemble une vraie fleur. Une feuille c'était une vraie fleur, une feuille pour zeux, c'était carré parce que la toile, c'est carré, hein, pis pour faire le rond bien faut tu mettes deux points dans le même trou pis la laine était plus grosse parce qu'y filaient la laine tout ça. Pis ça commencé comme ça, pis a faisait des, pis les femmes ont commencé à l'écouter pis y avaient envie de teindre pis envie d'avoir de l'argent mais dans ce temps-là, y avaient pas d'argent, y avaient pas, pis les femmes bien tu faisais le train de la grange pis tu travaillais sur la ferme pis tu soignais tes enfants pis c'était ça. Y avait pas, y avait personne qui pouvait travailler, une femme, y les engageait pas, c'était ça! Ça fait que ça, bien, ça leur faisait de l'argent pis y ont commencé, pis les grands tapis, bien, c'était des grands cadres, tu sais les grands cadres que fallait tu mis dans les maisons. Pis y vivaient pour le tapis parce que c'était l'argent qu'ils avaient pis y l'avaient jamais eu avant. Pis l'hiver, bien, c'était toute à crédit hein, ça fait que tout ça bien ça les payait, mais c'était pas beaucoup payé. Ça venu jusqu'à une piasse le pied carré. Ça fait, ils ont fait le plus grand tapis qui a été fait : y avait 648 pieds de carré, 18 x 36. Ça prenait un grand cadre que y avait personne qui avait des maisons pour faire ça, ça fait qu'ils avaient fait ça l'été, dans l'aire d'une grange, pis ça avait pris six mois à faire. Y avait dix femmes qui travaillaient dessus, pis la femme qui était en charge a l'a teindu. Ils ont filé 200 livres de laine, pis la femme qui était en charge bien y avait un, a l'avait comme un râcleau pis y avait une p'tite savane, là, pis là y avait un ruisseau qui passait. A l'a mis un p'tit poêle près du ruisseau pour avoir de l'eau pis a l'a teindu les 200 livres de laine dans la savane sur ce p'tit poêle-là. Pis là après ça bien ils ont, ils ont toutes sortes pis y avait 120 couleurs, ça fait c'était, c'était de l'ouvrage. Pis là y ont travaillé six mois dessus à 8h le matin jusqu'à 9h le soir pour ça. Y étiont dix femmes. Mais faut dire que y avaient du plaisir, y parlaient pis y avaient des histoires, toutes sortes d'affaires pis on avait toute ça bien sûr à Chéticamp. Le village, c'était tout ce qu'on avait, y avait pas, y avait un radio c'est toute pis le matin bien c'était comme ça que ça se fait tout le temps, tu sais, pis y avaient vendu ça à New York, y avait 120 couleurs pis le patron, c'était un patron qu'a l'avait été pris du Louvre à Paris. C'était toutes des couronnes pis des belles fleurs, c'était beau, c'était, pis y avait beaucoup de… Ça était dit, ça été mis sur le journaux, j'pense, pis y avait beaucoup de touristes qu'ont venu voir ça. On a des portraits là, pis y sont posés dans l'arbre parce qu'on peut pas mettre ça dans une maison ni rien : c'était trop grand. Fait que ça, c'était le plus grand tapis qui a été fait. C'est pas croyable toute ce qu'y ont fait pour nous autres, pis personne le savait pis personne apprécie ça, fait que c'est pour ça que je voulais écrire. J'ai pas écrit le livre, mais j'ai fait la recherche. C'est le père Anselme Chiasson qui a écrit le livre pour montrer aux jeunes qu'on avait pas eu cette industrie-là pour rien, nos grands-mères pis nos arrière-grands-mères ont travaillé très, très dur pour former l'industrie. Y savaient pas qui formaient une industrie, mais y l'ont formée pis c'est une grosse industrie parce que à Chéticamp maintenant, on vend des tapis ça fait plusieurs années. On vend des tapis pour à peu près un demi-million de dollars par année. Ça fait ça nous fait une industrie qu'on a eue nous autres pour rien, mais faut pas, faut pas, faut se souvenir que nos ancêtres ont travaillé beaucoup, beaucoup dur.
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Title: Chéticamp, N.S.
Description: Anne-Rose Deveau recounts stories of her village, Chéticamp, N.S., and its famous hooked rugs.
Subjects: villages
Source: Connections Productions
Language: French
Date: 2007-03-05
Creator: Connections Productions
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